Depuis l’ouverture d’une action en justice contre l’ancien premier ministre Augustin Matata Ponyo pour un présumé détournement des fonds du projet Bukangalonzo, le débat ne cesse de d’être alimenté dans l’opinion sur la compétence de la cour constitutionnelle à connaître les infractions commises par un ancien premier ministre dans l’exercice de ses fonctions. Pour les uns, la haute cour est bien compétente alors que pour d’autres, c’est plutôt la cour de Cassation qui est habilitée à juger un ancien chef du gouvernement. Dans le souci d’apporter sa contribution à ce débat qui ne met pas d’accord les juristes de tout bord, Maitre John Mbombo Mitangu, avocat aux barreaux du Kasaï oriental et de Kinshasa Matete donne son point de vue à travers cette chronique.
A. Du point de vue Constitution congolaise.
Au regard des articles 163, 164, 166 et 167 de la constitution, la Cour constitutionnelle est le juge pénal du P.R et P.M, pour deux catégories d’infractions, à savoir :
1) les infractions politiques (art. 164 const);
2) les infractions de droit commun commises dans l’exercice de leurs fonctions.
Pour celles commises en dehors de l’exercice de leurs fonctions, toutes poursuites suspendues, pour reprendre après fin de leurs fonctions devant les juridictions de droit commun.
En suite, les poursuites pénales par la Cour constitutionnelle ont un intérêt qui en constitue une finalité, en ce sens qu’une fois la condamnation prononcée par la Cour Constitutionnelle, celle-ci prononce également la destitution des fonctions des hautes autorités concernées.
Dans le cas sous examen ( pour le sénateur Matata), l’intérêt de la Cour constitutionnelle a cessé d’exister, car ne pouvant plus prononcer la destitution suite à la perte de la qualité.
Donc, lorsque les poursuites sont engagées après avoir perdu la qualité et pour des infractions commises avant, pendant mais aussi après l’exercice de ses hautes fonctions, l’ancien P.R ou P.M devra relever des juridictions de l’ordre judiciaire ( cfr. Wané BAMEME, procédure pénale, p.53).
B. Du point de vue Droit Pénal.
Nous pensons, qu’il faut bien saisir la portée du principe de la cristallisation de la qualification des faits au moment de la commission.
Ce principe veut que les faits demeurent valable et insusceptible ou indifférent aux modifications qui peuvent intervenir ultérieurement en faveur du prévenu, même en cas de repentir actif.
A retenir que ce principe rend intangible le fait et non la qualité de l’auteur au moment de fait, il ne rend non plus intangible la fonction de son auteur.
C’est un principe qui est invoqué par une partie au procès au moment où une question de qualification se pose, il relève donc du fond, alors qu’avant ça, le juge doit vérifier sa compétence personnelle qui s’apprécie au moment de poursuites, et non au moment de fait, cette dernière question relève de la forme.
Bien au delà, ce principe de la cristallisation ne trouve pas sa raison d’être en droit pénal politique ( qui régit les infractions politiques), car même la qualification de fait peut changer en droit pénal politique selon le statut actuel de l’autorité politique.
En conclusion : la Cour de cassation est ici, seule compétente, car au moment de poursuites, l’auteur a la qualité de sénateur, et parceque là cristallisation ne rend pas intangible la qualité ( du P.R ou P.M) mais plutôt le fait infractionnel et enfin, parceque ce principe est inopérant en Droit Pénal politique.