Le Président de l’assemblée provinciale du Haut Katanga, Gabriel Kyungu Wa Kumwanza est décédé le dimanche 22 août à Moanda, en Angola. Il y avait été transféré quelques jours plutôt pour des raisons médicales. Le chef de l’État, le premier ministre, les personnalités politiques, bref, presque toute la Nation congolaise a rendu hommage à cette illustre personnalité qui a marqué l’histoire du pays.
« Baba Kyungu », comme on aimait bien l’appeler à Lubumbashi, son bastion, dirigeait l’Union nationale des fédéralistes du Congo, UNAFEC, parti politique dont il est fondateur. L’un des treize parlementaires et cofondateurs de L’UDPS, il était parmi les rares survivants des figures emblématiques qui ont mené la vie dure à Mobutu et ont fragilisé le pouvoir sans partage de « l’aigle de Kawele ». Mais l’homme n’a pas toujours été du bon côté de l’histoire de la RDC et son personnage demeure encore sujets à controverse jusqu’après sa mort.
Acteur majeur du tristement célèbre refoulement des « Bilulu »
Près de 30 ans après les faits, le fameux discours de Gabriel Kyungu Wa Kumwanza, encore gouverneur du Katanga, contre les peuples LUBA raisonne encore frais dans la mémoire de plusieurs. Les blessures de cet épisode sombre des ressortissants du Kasaï oriental vivant au Katanga sont loin d’être cicatrisées.
Galvanisé par Mobutu, Kyungu Wa Kumwanza arrange les jeunes Katangais et incite au refoulement de tous les kasaiens de la « région du Shaba », en 1992. Des scènes surréalistes des familles entières disloquées, hommes, femmes, enfants, abandonnant tout derrière eux et s’engageant sur un parcours de plus de mille kilomètres à pied. Sur le parcours, plusieurs milliers de personnes ont laissé leur vie dans ce qui est qualifié aujourd’hui de « cimetière le plus long du monde ». Et ce dans le désarroi le plus total, si bien que d’aucuns parlent d’un génocide.
Jusqu’à sa mort, Gabriel Kyungu, considéré comme instigateur principal de ce drame, n’a jamais répondu de ses actes devant la justice, malgré les appels incessants des victimes qui continuent de demander réparation. Dans une interview télévisée en 2019, il a même parlé de « dommages collatéraux d’un conflit intercommunautaire », pour désigner le désastre causé par la traque de ceux qu’il appelait à l’époque « Bilulu » (En swahili, qui signifie « insectes »), sans jamais demander pardon.
« Oublier le passer, regarder le présent et préparer l’avenir »
Depuis le refoulement de 1992, Baba Kyungu n’avait plus bonne presse au sein de la communauté Luba du Kasaï oriental, à cause de cette triste page de l’histoire. En 2019, après les élections générales au pays, il est rapproché par le nouveau chef de l’État, Félix Tshisekedi, fils de l’opposant historique Étienne Tshisekedi, qui était, à l’époque du refoulement, animal à abattre pour Kyungu, ses protégés et ses supporters. Un rapprochement suivi d’un discours de plus en plus tendre et aimable pour le nouveau pouvoir qui bénéficie en même temps d’un soutien tous azimut des Lubas. Félix Tshisekedi étant lui-même ressortissant du Kasaï oriental.
Et c’est uniquement pour cette raison que nombreux Kasaiens essaient de tourner cette page.
« Nous avons de bons souvenirs [de Gabriel Kyungu], et il y’a des mauvais. Mais dans la Bible, Abraham aussi avait commis des erreurs. Lorsqu’on a commencé à écrire la bible, on n’a énuméré aucune qu’Abraham avait faite. Nous reconnaissons en Kyungu Wa kumwanza un héros de la révolution de la démocratie en RDC », tempère Serkas Kasanda Kadiesa, député national de l’UDPS, qui demande en même temps à la population du Kasaï oriental « d’oublier le passer, de regarder le présent et de préparer le futur ».
Pour sa part, Richard Kanyinda Kana, coordonnateur provincial de Ensemble pour la République, estime que le parcours de l’ancien président de l’assemblée provinciale du Haut Katanga doit interpeller les hommes politiques congolais, en ce qu’ils doivent éviter de diviser le peuple.
« Après avoir semé la haine et la division tribale dans les coeurs et les esprits des congolais qui se sont donnés à une chasse à l’homme entre eux-mêmes congolais; à la fin de ses jours, on l’a vu faire des efforts pour pouvoir reconvertir les siens vers l’amour pour ceux qui, hier, étaient les mal aimés du Katanga. C’est une interpellation à nos politiciens congolais, de savoir que ce que nous semons aujourd’hui, c’est difficile de le changer du jour au lendemain », dit-il en interpellant les dirigeants actuels à éviter « la politique d’exclusion et de ségrégation.
Au sein de la communauté du Kasaï oriental, comme sur les réseaux sociaux, plusieurs sont ceux qui réclament encore justice, même après la mort de Kyungu Wa Kumwanza. « Il n’y a pas de pardon sans réparation ni justice », insiste un acteur de la société civile pour qui, les crimes commis par le défunt sont « imprescriptibles même après sa disparition. »
|Par Arsène MPUNGA
Très profond le texte mais comme on nous apprend de toujour bien parler d’un mort on ne peut que dire qu’il trouve la miséricorde de Dieu et quil répose en paix