Secrétaire exécutive de l’ONG Femmes main dans la main pour le développement du Kasaï, FMMDK, Nathalie Kambala est engagée dans la lutte contre les violences sexuelles et celles basées sur le genre au Kasaï central depuis 2012, année de la création de sa structure. Sur terrain, son organisation est au front dans le monitoring, la sensibilisation, le plaidoyer et la réinsertion sociale des victimes des VBGs. Alors que le monde s’apprête à célébrer le 8 mars prochain la journée internationale de la femme, Nathalie Kambala revient sur la recrudescence des cas de violences dans la région, causes et remèdes, dans une interview exclusive accordée à Tambour Matin.
Propos recueillis par Vanessa Nkongolo
TM: À quand remonte votre implication dans la lutte contre les violences sexuelles et celles basées sur le genre, VBGs?
NK: Nous sommes une ONG qui a été créée depuis 2012 ici au Kasaï central. Nous avons divers domaines d’intervention. Nous sommes dans la bonne gouvernance, dans la protection et la promotion de la femme et de la jeune fille, dans l’autonomisation de la femme, dans la lutte contre les violences sexuelles et celles basées sur le genre et aussi la protection de l’environnement…Depuis que nous avons créé cette ONG, c’est parce que nous avions cru en la femme, parce qu’elle avait des atouts et des potentialités d’aider la province à évoluer. Mais nous avons compris à un certain moment qu’avec la guerre de Kamuena Nsapu, nous avons traversé des moments difficiles et qu’il y’a recrudescence de cas des violences sexuelles. Notre structure est parmi celles qui sont très dynamiques sur terrain dans le cadre de la lutte contre les violences sexuelles. D’abord dans la prévention où nous passons nos messages de sensibilisation. Nous sommes dans la vulgarisation des différents textes et aussi faire le plaidoyer auprès des partenaires et les autorités politico administratives pour une prise en charge holistique des victimes des violences sexuelles.
TM: Les VBGs, Qu’est-ce?
NK: Les VBGs ce sont les violences sexuelles et celles basées sur le genre. C’est tout acte qui est commis sur une personne sans son consentement mais avec le profit d’avoir son sexe. Ici au Kasaï central, nous les avons catégorisé en six types. Il y’a des viols, des agressions sexuelles, des mariages précoces, les agressions physiques et psychosociales et déni de ressources d’opportunités de service. Mais ici au Congo, on reconnaît seize infractions dont le viol a un pourcentage très élevé.
TM: Quel état des lieux faites vous des violences sexuelles et violences basées sur le genre dans la région du Kasaï que vous couvrez?
NK: Aujourd’hui, le Kasaï central devient l’épicentre des VBGs. Et ce qui est grave c’est que nous ne sommes pas pendant la guerre, nous n’avons pas aujourd’hui des conflits coutumier et armé, mais nous avons un taux élevé des VBGs. Dans la plupart des pays aujourd’hui, qui ont des guerres et des conflits, on utilise les violences comme une arme de guerre. Mais ici au Kasaï central, on en a de toutes formes. L’état des lieux aujourd’hui montre que nous vivons avec la plupart des bourreaux dans la communauté. C’est soit les parents des enfants, les cousins, les oncles, les personnes qui nous sont familières, les responsables, les chefs coutumiers, les autorités politico administratives, même dans l’appareil judiciaire…et c’est très dangereux. De tous ces actes documentés ici au Kasaï central, le viol a au moins 91% des cas…Dans FMDK, notre structure, nous avons documenté plus 1080 cas pour l’année passée seulement. Aujourd’hui, depuis le début de l’année 2021 jusqu’au mois de mars, nous avons déjà 308 cas des violences sexuelles et celles basées sur le genre commises sur les femmes et sur les jeunes filles.
TM: Qu’est-ce qui est à la base de cette recrudescence des violences sexuelles et celles basées sur le genre
NB: Il y’a beaucoup des facteurs qui causent les VBGs dans l’espace du grand Kasaï. D’abord nous avons notre culture qui ne permet pas à la femme de s’épanouir et elle subit des actes de violences sexuelles tous les jours…Au delà des pesanteurs culturelles, nous avons aussi la scolarisation des enfants, l’analphabétisme des femmes, la pauvreté à outrance des femmes. Elles n’ont pas des moyens à telle enseigne qu’elles puissent s’exposer pour avoir gain de cause. Et aussi dans une zone poste conflit, lorsqu’il y’a une zone opérationnelle et qu’il y’a des militaires tout le temps en divagation, les femmes sont toujours exposées à des actes des violences sexuelles et celles basées sur le genre. Il ya aussi l’insécurité dans la province. Lorsqu’on n’a pas accès facile aux services sociaux de base, on n’a pas de courant, il fait noir à partir de 18h, on n’a pas d’eau, on doit se réveiller très tôt pour aller à la source…il y’a beaucoup des facteurs favorisants…Aujourd’hui les filles sont exposées à des points sexuellement transmissibles…
TM: Que faire pour mettre fin aux VBGs au Kasaï central?
NB: Je pense qu’il y’a beaucoup de mécanismes qu’on devrait mettre à la disposition des structures qui luttent contre les violences sexuelles, en commençant par le gouvernement. L’année passée nous avons validé la stratégie nationale de lutte contre les violences sexuelles et celles basées sur le genres. Cette stratégie n’a jamais été vulgarisé ici, je me pose la question si même les autorités politico administratives en ont même dans leurs bureaux. C’est très dangereux. Nous avons des édits portant suppression de toutes les coutumes rétrogrades à l’égard de la femme…ce sont des instruments que le gouvernement devrait mettre à la disposition des gens.
TM: Madame Nathalie Kambala, Tambour Matin vous dit Merci.
Suivez l’intégralité de l’interview en ici.
Un bon travail réalisé par TM. Mais c’est tellement malfaisant, l’état des lieux des VBGs.
Surtout avec les points seulement transmissibles. 😭😭 Bon courage à l’organisme.